16 mai 2019

 

Les associations signataires, membres du Collectif Civil pour les Libertés Individuelles et alliées, fêtent cette année le 17 mai, Journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie, alors que la situation des personnes LGBTQI++ stagne et les institutions officielles de l’Etat continuent à utiliser des lois liberticides et des pratiques homophobes et transphobes ;

 

Sur le plan juridique, les articles qui sanctionnent les personnes ayant une sexualité, une identité ou une expression de genre non normatives, sont toujours là, immuables et entrainant d’innombrables cas de harcèlement et d’intimidation, et des dizaines d’arrestations, dont certaines aboutissent à des condamnations, chaque année;

Ces mêmes dispositions juridiques reconduisent leur silence en ce qui concerne le changement d’état civil, et laissent la porte ouverte devant des interprétations judiciaires aléatoires et des pratiques pénitentiaires honteuses à l’égard des personnes Trans* ;

 

Sur le plan judiciaire, la police procède à arrêter et à interpeller des personnes ayant une apparence ou une attitude sur la base de laquelle elle se permet de présumer leur identité sexuelle ou de genre. Les tribunaux continuent également à appliquer l’article 230 du code pénal qui sanctionne de 3 ans d’emprisonnement, les personnes homosexuelles, et l’article 226et suivants pour élargir la répression à tout acte ou attitude contraires« aux bonnes mœurs » et qui « heurtent la pudeur ». Malgré l’engagement des autorités tunisiennes à ne plus avoir recours aux tests anaux pour prouver « la sodomie » et ce, depuis 2017, les tribunaux continuent à ordonner cette pratique considérée à l’échelle internationale comme une pratique de torture.

 

De son côté, le gouvernementpoursuit son acharnement contre l’association Shams et demande encore et toujours sa dissolution, en engageant une procédure dans ce sens devant les tribunaux ;

 

Sur le plan social, et devant cet environnement légal et institutionnel hostile à la diversité et la différence, les crimes homophobes et transphobes se poursuivent dans une atmosphère d’impunité. Atmosphère qui fait qu’un grand nombre de personnes LGBTQI++ souffrent en silence et se désistent de leurs droits les plus élémentaires : ester en justice, la santé, l’éducation, le travail… Plusieurs d’entre elles ne quittent leur domicile qu’en cas de nécessité absolue, afin d’éviter tout risque de harcèlement, de violence ou d’arrestation. D’autres, se sont trouvées dans l’obligation de quitter le pays.

 

Devant cette situation alarmante, les associations membres du collectif Civil pour les Libertés Individuelles, appellent :

 

  • L’Assemblée des Représentant.e.s du Peuple, à accélérer le processus de mise en place de la cour constitutionnelle, la principale garantie du respect des droits définis par la Constitution dans les lois en cours d’élaboration et d’application, et l’examen et l’adoptiondu projet du Code des libertés individuelles qui a été déposé par un ensemble de député.e.s depuis le mois d’octobre 2018 ; projet qui prévoit la reconnaissance de l’identité de genre et le changement de sexe, la dépénalisation de l’homosexualité, la sanction de l’homophobie…
  • Le Chef du gouvernement, à arrêter une politique pénale nationale basée sur les droits humains « dans un Etat civil et démocratique » (Article 49 de la Constitution) et qui reconnait le droit à la différence, y compris en matière d’identité sexuelle, d’expression et d’identité de genre. Ainsi que de bannir les pratiques policières et judiciaires qui continuent d’arrêter et de juger les personnes sur la base de leur identité apparente ou présumée ;
  • Les ministres de la Justice et de l’Intérieur, à veiller à une bonne application de la constitution en abandonnant cet acharnement policier et judiciaire contre les personnes LGBTQI++ et en instituant de bonnes pratiques au niveau des agents de la police judiciaire et des agents des services pénitenciers pour le respect de la dignité humaine des personnes LGBTQI++ ;
  • Les magistrat.e.s de la République, à appliquer la Constitution qui fait d’eux/elles les protecteurs des droits et des libertés, à écarter l’application des articles contraires à cette norme suprême et notamment les articles 230 et 226, à ne plus ordonner le test anal ; et à adopter une jurisprudence respectueuse des droits des personnes à une identité sexuelle et de genre, qui correspond à leur être et continuer dans le même sens que la décision du 9 juillet 2018, qui reconnait le droit au changement de sexe et au changement de l’identité légale dans les documents officiels ;
  • Les médecins légistes, à refuser de pratiquer le test anal, banni par le conseil national de l’ordre des médecins, et à appliquer leur Code de déontologie médicale qui fait de la dignité une valeur fondamentale de ses dispositions ;
  • Les médias, à adopter une attitude respectueuse des droits humains des personnes LGBTQI++ et de se retenir d’utiliser tout discours homophobe et transphobe.

 

Les associations signataires :

1.      Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme

2.      Association Tunisienne des Femmes Démocrates

3.      Association Tunisienne de Défense des Libertés Individuelles

4.      Association Beity

5.      Association Damj – pour la justice et l’égalité

6.      Association Tunisienne de Prévention Positive

7.      Association Shams

8.      Association Mawjoudin

9.      Association Chouf

10.   Association pour la promotion du Droit à la Différence

11.   fédération tunisienne pour une citoyenneté des deux rives

12.   Association CALAM

13.   Legal Agenda Tunisie

14.   Association Tunisienne de la santé de la reproduction

 

 

 

15.   Groupe Tawhida Ben Cheikh

16.   Association Tahadi

17.   Association Free Sight

18.   Association Fanni Raghman Anni

19.   Association Doustourna

20.   Avocats Sans Frontières

21.   Fédération Internationale des Droits de l’Homme

22.   Réseau Euromed Droits

23.   Human Rights Watch

24.   Organisation Mondiale Contre la Torture

25.   Association Al Bawsala

26.   Collectif Outcasts

27.   Association Alwani

28.   Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme

29.   Association Tunisie Terre des Hommes

30.   Fondation Ahmed Tlili pour la Culture Démocratique